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La caméra CCD Audine

Par Boris MALZAK

Voici quelques notes qui vont vous permettre de vous faire une idée sur la conception mécanique de la caméra CCD Audine-Safga.

Les objectifs :
– une caméra qui ne givre pas ;
– un obturateur intégré ;
– boire son café tranquillement et bien au chaud.

La caméra CCD est composée de deux éléments tournés et fraisés à partir d’un bloc d’aluminium et d’une barre de dissipateurs thermiques. La face avant et le corps central sont taillés dans la masse et forment une seule pièce. Le radiateur est celui du projet Audine, à ceci près que sa section n’est pas carrés mais cylindrique. La caméra est étanche afin de remplacer l’air à l’intérieur du boîtier par de l’azote, pour éviter la formation de givre sur le CCD.

Le corps de caméra

Le corps de la caméra CCD mesure 112 mm de diamètre et fait 11 mm d’épaisseur. Cette épaisseur supporte 3 trous taraudés au pas Kodak avec une embase plane. L’ouverture mesure de 42 mm de diamètre, au pas de 1 mm. Le corps porte une bride de 120 mm de diamètre qui reçoit le dissipateur thermique. Elle accueil entre un joint torique de 100 mm. La longueur totale du boîtier fait 75 mm. La vitre du hublot est porté par l’intérieur, comprimée entre un joint torique et une bague de serrage. Un espace de 25 mm entre la matrice CCD et le hublot permet d’intégrer un obturateur.

Photo de face du corps de la caméra CCD
Photo de l'arrière du coprs de la caméra CCD

Le joint Viton

Le joint de la caméra va devenir poreux à cause des micro-rayures provoquées lors des démontages et du vieillissement du matériaux. C’est un joint Viton, qui possède une résistance importante aux contraintes mécaniques, à l’usure et au vieillissement. Sa durée de vie est de 5 ans. Sa masse est plus importante qu’un joint standard, dont la durée de vie ne dépasse pas 1 an et demi.

La gorge du joint pour le hublot

La gorge du joint pour le hublot est définie précisément pour respecter le coefficient de résilience du verre. L’effort de pression exercée par la bride doit provoquer l’étanchéité sans casser la vitre.

Pour garantir l’étanchéité, la profondeur de la gorge ne doit pas dépasser 70 % du diamètre de section du joint. La gorge n’est pas en forme de U, mais a une inclinaison de 2 à 5° pour optimiser l’écrasement. Elle ne doit pas comporter de rayure transversale.

Après serrage, l’écrasement du joint doit être de 10 à 15 % du diamètre de sa section. Ainsi, si la section du joint vaut 2 mm, la profondeur de la gorge de logement doit mesurer 1,6 à 1.7 mm maximum.

Plan d’une gorge à joint d’une CB245 de Philippe Brottes utilisée dans nos boîtiers.

Plan d'une gorge à joint d'une CB245

Le hublot

La vitre du hublot en verre traditionnel pour le projet Audine est ici remplacée par un verre Schott WG 305. Elle mesure 50 mm de diamètre et 3 mm d’épaisseur.

Les transmissions optiques des deux matériaux sont similaires. Cependant, la fenêtre en verre traditionnel a une transmission toujours inférieure à 90 %, qui décroître sensiblement au delà de 600 nm de longueur d’onde et qui décroît rapidement pour tendre vers zéro en dessous de 300 nm (mais n’est pas nulle). Par contre, la transmission de fenêtre en WG305 est quasi-nulle (10-5) jusqu’à 290 nm et atteint un taux de transmission linéaire de 92 % dans le visible, même au delà de 600 nm. Quelques mesures ont déterminé un écart de 10 % de transmission dans le bleu en faveur du verre WG 305. Ce n’est pas à négliger connaissant la faible sensibilité d’une matrice Kaf-400 dans ces longueurs d’onde.

Les sources techniques sont disponibles à partir du logiciel de SCHOTT. On mesure la transmission du hublot en verre traditionnel à partir du spectromètre de mon opticien.

Graphique de la transmission du hublot par rapport à la largeur du spectre
Graphique UVA UVB par rapport à la longueur d'onde

L’obturateur

Selon le type d’obturateur que l’on dispose, on peut fixer la bride de serrage du hublot en coupant la partie cylindrique en plastique. Puis on emboîte ce manchon sur la bride.

Photo de l'obturateur démonté
Photo de l'obturateur monter sur la bague

Découvert par hasard en démontant un bloc optique de caméscope, cet obturateur répond au projet Audine : gratuit et fonctionnel. Il s’agit d’un diaphragme, composé d’un électro-aimant muni d’un bras de levier qui ouvre et ferme simultanément 2 volets symétriques très fins et légers. L’un des volets a une particularité : il est muni d’une petite languette qui se positionne au centre de l’axe optique lors de la fermeture ; c’est un diaphragme dit progressif. Les 2 volets se recoupent. De cette manière, aucune lumière ne peut passer lorsque les volets sont fermés.

Le mouvement d’ouverture et de fermeture est très doux. Aucune vibration n’est ressentie et il est surtout rapide. En utilisant uniquement les 5V disponibles sur Audine, sa vitesse maximum est de 1/50e s. L’ouverture centrale vaut 9×6 mm. L’obturateur couvre le champ d’une matrice Kaf-400 pour les plus petits diaphragmes, sinon il couvre aisément une Kaf -1600.

En général, les constructeurs réduisent l’encombrement en profondeur à 25 mm. Cependant, le petit dernier à droite ne mesure que 17 mm de profondeur. Une Audine normale peut le recevoir.

Photo du corp de la caméra avec l'obturateur
Photo du diaphragme de l'obturateur à coté d'une pièce de 1 franc

Pour piloter cet obturateur, il faut une électronique :

Schéma de l'électronique de l'obturateur

Le vide

Le vide est un très bon isolant thermique, ce qui a l’avantage de limiter l’échange thermique entre le CCD et la vitre du hublot, car une fois le hublot refroidi, le givre ou la condensation peuvent apparaître non plus sur le CCD mais sur la face extérieur de la vitre. Malheureusement, le vide ne convient pas aux circuits électroniques, qui sont normalement refroidis par l’air ambiant.

Dans le vide, les composants électroniques ne peuvent plus évacuer la chaleur qu’ils génèrent et s’échauffent beaucoup ! Si la chaleur n’est pas évacuée, ces composants risquent de brûler (et de déposer à l’occasion un dépôt métallique sur les surfaces optiques – c’est le principe du dépôt métallique par évaporation, comme les aluminures de miroirs). D’autre part, la plupart des matériaux dégazent une fois dans le vide. Le vide est aussi le champion de la fuite, et il est difficile de maintenir une enceinte sous vide dans le temps. Dans tous les cas, il faudrait pomper le gaz résiduel (issu du dégazage et des fuites) régulièrement, ce qui nécessite une pompe à disposition. Enfin, un boîtier sous vide fragilise le hublot ; il faut le manipuler avec précaution.

Le gaz

On peut remplacer l’air dans le boîtier par un autre gaz. En général, il sera un bon conducteur thermique. Première conséquence : le refroidissement du CCD est meilleur parce qu’il ne se fait plus qu’au niveau du doigt thermique le liant au module Peletier. Si le gaz est en légère surpression, il peut éliminer certains dépôts sur le capteur. Cependant ses propriétés thermiques conduisent à refroidir aussi la fenêtre du hublot, qui fait face directe au CCD, et une condensation ou un givrage sur sa face externe sont possibles si le CCD est trop froid. Le gaz permet enfin aux composants électroniques d’évacuer correctement leur chaleur, et le boîtier est facile à manipuler.

Solution ?

Chacun se fera sa propre opinion, cependant notre choix est le gaz. Une micro vanne est à notre disposition, c’est une vanne de type Schraeder.

Fonctionnement de la vanne

C’est la pression intérieure qui assure la fermeture du clapet, d’où la nécessité d’avoir un gaz en légère surpression. Voici 2 vannes (photos) qui ont ce même fonctionnement. Remarquez leur faible encombrement. La valve de pneu de voiture est filetée pour se visser sur le dissipateur.

Photo d'une vanne de pneu de voiture à coté de la vanne du projet caméra CCD
Photo d'une vanne avec son dissipateur

À gauche : valve utilisée pour purger des réfrigérateurs ; À droite : valve de pneu de voiture.

Les connecteurs

Pour conserver une bonne étanchéité dans le boîtier nous avons réalisé une interface étanche en utilisant 2 connecteurs soudés l’un à l’autre, les contacts sont décolletés et non en feuille roulée afin d’éviter qu’ils ne soient bouchés par la résine. On réalise ensuite un coffrage en ruban adhésif uniquement au niveau des contacts soudés.

Phtot de 2 connecteur
Photo des 2 connecteurs soudés à la bague de la caméra

La face arrière

Les connecteurs sont vissés et puis enrobés à nouveau de résine pour assurer l’étanchéité. On réalise le coffrage en patte à modeler. Il a fallu créer une entretoise en laissant 1 mm d’épaisseur de radiateur au niveau de la surface d’appui de chaque connecteur. En effet, la profondeur d’un connecteur est de 6 mm, l’épaisseur du radiateur seulement de 5 mm.

Le radiateur est réduit à un diamètre de 120 mm sur lequel un ventilateur Papst (réf. : 612 NGML) de 60×60×25 a été monté. Il est à paliers lisses et ne génère pas de vibrations. Cet élément est très important car il peut dégrader toutes vos images. Son branchement est fait directement sur les connecteurs étanches.

Photo de la caméra équipé de son radiateur
Photo de la caméra fini

Les résultats

Les résultats sont plus que satisfaisants. Depuis le mois de novembre 1999, nous réalisons des essais qui, finalement, n’en sont plus depuis notre première image. Faute de pompe à vide disponible dans l’immédiat, la caméra CCD Audine est utilisée avec de l’air et maintenue dans cet état jusqu’à ce jour ! Celle-ci n’a jamais montrée de signes de faiblesse, à savoir pas de givre, même dans des conditions météorologiques différentes : humidité ruisselante, givre (extérieur), temps sec et froid par -11°C à 1000  m d’altitude dans les Vosges. L’obturateur de type diaphragme exprime tout son potentiel à travers cette caméra CCD Audine. Sa rapidité, son faible encombrement, l’absence de vibration et son électronique basique en font une pièce maîtresse dans l’exploitation de la caméra : le confort. Nos observations sont faites en totale autonomie, un café à l’appui et bien au chaud ! Nos objectifs sont atteints : 8 caméras sont réalisées de cette manière.

Photo de la caméra CCD Audine monter sur le porte occulaire d'une lunette astronomique
Photo d'une lunette astronomique avec la caméra CCD piloté à distance d'une voiture

Tout cela n’aurait pas été possible sans notre super mécanicien, M. Bernard Schwebel, et électronicien Alain Maetz que je remercie grandement.